Bienvenue dans mon univers!

Egérie de mon blog littéraire, elle sera la pour laisser une trace de poussière de fée au milieu de ma sélection de livres….Ne vous fiez pas à l’aspect enfantin, car mes préférences vont, le plus souvent, vers les thrillers…..

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« Chaque fois que quelqu’un dit: Je ne crois pas aux contes de fées, il y a une petite fée quelque part qui tombe raide morte. « 

J.M.Barrie, Peter Pan

Dans l’écho lointain de nos voix, Brandon Hobson

🔥Chronique🔥

Bien-aimé lecteur, permets-moi de tenter une chronique fragmentée qui illustre Dans l’écho lointain de nos voix…J’ai envie que ce soit bien, mais encore faut-il que je vous parle de la famille Echota…

Nous pourrions croire dans les premières pages, que c’est une simple histoire de drame. La perte d’un fils. La perte d’un frère. L’explosion d’une famille. C’est très long le délitement des liens, mais irrémédiable. La mort de Ray-Ray a complètement modifié la trajectoire des membres de cette famille. Le deuil qui les frappe est si fort, que chacun sombre à sa façon. L’absence de pardon. La drogue. La dépendance affective. Alzheimer. Vous voyez: des fragments éparpillés aux quatre vents. Des souffrances à l’état pur. Des corps et des esprits marqués à jamais.

Mais il y a une donnée qui change tout. La famille Echota est Cherokee. Et nous sommes en Amérique. Tuer un indien, fait partie de leur Histoire. On pourrait presque parler d’un hobby, d’un rite à effectuer, d’un fait mineur au regard de leurs lois. Pire, la justice est avec eux si un homme blanc massacre « malencontreusement » ce peuple ancestral.

Du coup, ce n’est plus un simple fait divers, mais un problème majeur de société que dénonce Brandon Hobson dans ce livre. Il y a de plus en plus de voix qui s’élèvent contre cette extinction de masse, et il est temps qu’elles soient entendues, reconnues, prises en compte. On n’a plus le droit de fermer les yeux sur cette horreur inhumaine de La Piste des Larmes.

Bien-aimé lecteur, bien sûr qu’il y a une tristesse évanescente qui accompagne cette lecture. Mais il y a également la beauté. Une beauté insaisissable qui parle d’échos, d’esprits, d’animaux. Une connexion directe et indirecte avec les éléments, la nature, la spiritualité. Et il y a beaucoup de musique. Des étonnantes coïncidences. Des ombres tenaces. A l’approche de la date anniversaire et du feu de joie, tout converge pour que cette famille connaisse enfin, la paix, le bonheur, le vrai sens du mot famille. On se retrouve autour de ce foyer, dans une chaleur réconfortante, dans des histoires merveilleuses qui nourrissent nos imaginaires, dans les gestes infimes qui relient les âmes. Puisque chacun y croit, puisque c’est leur capital culturel transgenerationnel, la magie opère. La magie opère tellement que les voix m’ont parlé au cœur. Et mon cœur a quelque chose à vous dire: tous les fragments se sont rassemblés pour faire lumière, et c’est un coup de cœur, mon bien-aimé lecteur! C’est subtil, poétique, imprégné, je ne pouvais que succomber au charme de cet authentique et sincère feu de joie! À lire absolument mon bien-aimé lecteur!

Katie, Michael McDowell

🔥Chronique🔥

ON RECHERCHE. Jeune femme complètement désaxée avec un marteau à la main. Une meurtrière capable de prédire la mort, comme de l’administrer par des moyens diverses et variés. Se présenter avec un bon pactole sous le bras, en 1871, et attendre sa sentence.

Elle pourrait débuter ainsi, la petite annonce version Katie. Elle pourrait s’inscrire dans le journal des malfrats de l’époque, un journal à controverse, certes, et peu recommandable, mais aujourd’hui comme hier, c’est ainsi, les méchants fascinent. Et peut-être me permettrez-vous cette digression, mais je recherche dans ce questionnement, une réponse sincère et adéquate: depuis quand c’est le « vilain » qui vole la vedette au héros? Je sais qu’il y a une tendance actuelle à créer des méchants presque plus fascinants que le héros lui-même. Et du coup, ce n’est plus les valeurs chevaleresques que l’on priorise, mais bien celles de la violence, du chaos, de la cupidité qui prennent toute la place. Pourquoi? Est-ce que c’est le miroir de notre époque? Est-ce qu’un méchant est plus bankable qu’un gentil? En lisant Katie, on ne m’enlèvera pas cette évidence. Parce que Katie, c’est tout l’opposé de Philomena. Katie, c’est l’anti-héroïne que les gens vont adorer. Et non seulement, ils vont l’adorer, elle, mais l’idée même de cette adoration. Comme s’ils se grisaient de se rapprocher ainsi du côté obscur, tout en gardant une empathie envers l’une et l’autre. Mais l’une et l’autre ne sont animées que par la vengeance. Alors je m’interroge sur ce que Katie nous apporte, finalement…

ON RECHERCHE. Jeune femme désargentée avec le possible en sa main. La bonne samaritaine capable de donner sa vie ou son cœur au premier venu, et ne jamais regretter ce penchant bienveillant, quoi qu’il en coûte. Se présenter sous vos meilleurs auspices, et ne croire qu’en la grâce du destin…

Voici donc, une autre annonce. Une annonce à effet miroir pour vous présenter la douce et adorable Philomena. Et elle aussi, les gens vont l’adorer. Ils vont l’adorer parce que sa détermination est puissante. Toute gentille qu’elle soit, elle ne perd pas de vue, son objectif. Même au plus bas, même dans le désespoir et la peine la plus profonde, elle continue d’avancer et de croire en sa bonne étoile. Et faut dire qu’elle le lui rend plutôt bien, l’étoile qui veille sur elle…Mais la chance ne fait pas tout. C’est bel et bien une jeune femme, qui prend à bras le corps sa vie, et l’emmène vers les sommets, défonçant le plafond de verre par sa grandeur d’âme…Mais alors, je m’interroge: Philomena est-elle le faire-valoir de Katie ou l’inverse?

« Je crois que j’aimerai bien qu’on me dise la bonne aventure, à moi. »

Et Michael McDowell a fait ça très bien. Il m’a conté, une folle et bonne aventure. Pleine de surprises, de rebondissements, d’hémoglobines, de frissons, d’amour et de sororité. J’aime quand il me dresse des portraits de femmes fortes, avec autant de génie. Qu’il me mène dans des ambiances à la fois sombres et inquiétantes, tout en me parlant des gouffres dans lesquels s’engage la plupart des humains. Et c’est parce qu’ils sont si humains, si prévisibles dans leurs défaillances, qu’on se plait à les regarder se débattre avec leurs sentiments contradictoires. Et lorsque la cupidité rencontre la cruauté, il n’y a plus de limites à la bienséance, mais le plaisir est intact. Le plaisir de lecture à cette si bonne aventure est si grand qu’on est comme happé. Happé comme à proximité d’une voie d’un train. Pris dans une euphorie de page-Turner, on ne voit plus l’aspiration qui nous guettait du coin de l’œil, pour rendre son coup fatal. Le coup fatal du mot « fin ». Coup aussi brutal et efficace qu’un coup de marteau bien placé. Katie a du magnétisme, n’en doutez pas un seul instant. Un magnétisme à vous attirer indéniablement vers un coup de cœur…furieux!

Et pourtant je m’élève, Maya Angelou

🧡 Chronique 🧡

Merci Soleil, Pluie, Rosée

Merci Neige, Ciel, Lune

Merci de vous être penché

Sur cette femme phénoménale

Merci d’avoir laissé de votre fraîcheur

Sur le front de cette femme

Ainsi, elle peut nous réjouir de ses mots

Car ses mots sont ainsi

Ils gonflent, s’élèvent, s’envolent

Et comme ils redescendent sur nous

Le bruit de leurs sons

Claque Danse Déchire

Ils sont bons à s’en faire un printemps

Et maintenant qu’ils sont un peu à moi

Maintenant qu’ils éclairent mon sourire

Par un effet miroir du sien qui me revient

Je trouve ma place dans ses vers

La poésie féminine et engagée parle

En chacune puisque le genre nous lie

Si j’ai oubliée d’être phénoménale

Je n’ai pas pu oublier que je suis femme

Et le travail le voyage l’expérience

Chante trop ses gammes de douleurs

Pour que le sang et le silence entonnent

Des blues pour mourir encore

Et pourtant.

Et pourtant je m’élève

Je m’élève doucement

Comme s’il y avait un secret, une connivence

Avec cette femme phénoménale

Je m’élève comme un refus

Je vois sa confiance en elle-même

Et cela m’inspire, me gonfle, me soulève

Mes pieds quittent la terre et swinguent

Parce que mes pieds savent le chemin

De la liberté

La poésie est le vent qui me poussera

A chanter l’amour à tue-tête

Coûte que coûte je puiserai

Dans la détermination de mon aînée

La force nécessaire de ne plus courber

Je m’élèverai contre les injustices

Que l’Histoire nous a laissé

Et je n’aurai plus peur

Ce matin, j’ai envie de remercier

Le seigneur, les anneaux rouges

Le jour, l’hier, l’aube, la vie

Mais surtout Maya Angelou!

Gratitude et coup de cœur

En ce dimanche matin!

Le Monde véritable Jim Fergus

🏕️Chronique🏕️

« Dans les pages qui suivent, je tenterai donc de décrire ce monde « véritable ». Je sais déjà que je me heurterai sans cesse, non sans peine, au mur qui sépare le fantastique de ce que nous appelons la réalité… un concept qui, bien sûr, n’a rien de consensuel. »

Tenter d’expliquer un concept impalpable, c’est se heurter aux croyances limitées des sceptiques. C’est pour cela que Molly émet quelques réserves à leurs logorrhées fétides. Juste pour les prévenir qu’elle va manquer de preuves solides pour nous expliquer sa réalité. Sa réalité avec le peuple Cheyenne. Mais nous, nous les rêveurs, nous les poètes, nous les amoureux de la nature, bien sûr que cette histoire va nous emporter. Bien sûr qu’elle va nous émerveiller. Bien sûr qu’on va l’aimer. Je vous dis cela, parce que cette fable a tous les atouts: une ouverture sur un autre monde, une intelligence intuitive, une connexion avec la nature, un brin de réalisme magique, un lien avec les esprits. Et peut-être pour certains, la saveur savoureuse de la nostalgie, puisque l’on retrouve des ami.es…

Alors, je vais vous laisser vous délecter de savoir ce qu’est, le Monde véritable, mais m’attarder sur le fait que celui-ci est en danger. Qu’il a besoin de nous, vous, elles. Elles, investies à maintenir l’équilibre, l’harmonie, la pérennité. Elles, ces femmes fortes et formidables, remplies de savoirs. Elles, si fabuleuses, dans leurs alignements, leurs possibilités, leurs magies. Elles, qui m’ont carrément charmée, éblouie, fascinée. Rencontrer ces deux Molly, c’est admettre un autre monde d’abord, mais aussi, une autre culture, d’autres façons de faire, d’être, de sentir. C’est admettre aussi, que l’Histoire a laissé des blessures sur des peaux, des peuples, mes sœurs. C’est concevoir que les paradis sont multiples, et que les enfers sont étonnamment récurrents. C’est se faire à l’idée que l’altérité est une réalité même si elle nous échappe complètement parce que nous avons coupé des liens essentiels pour s’en approcher. Autant dire, que tous mes horizons ont bougé avec cette lecture. Et j’ai aimé la tempête. Et alors, je ne vous parle pas meme pas des illustrations intérieures sublimes, qui poussent à la méditation. Tout se referme sur des beautés. Des beautés spirituelles, poétiques, visuelles, humanistes, philosophiques. En fait, Le Monde véritable, c’est une invitation au voyage. Un voyage dont on ne ressort pas tout à fait pareil. J’étais Cheyenne, blanche, de couleur, louve, faucon, ourse, esprit, et forcément, ça imprègne. Tu ne peux pas être et ne plus être. Même Shakespeare a fait le tour de la question. Mais moi, je ne questionne pas, je m’imprègne, j’expérimente, j’imite, c’est comme cela qu’on devient changeuse de forme. Et avec ces quelques pages, la métamorphose est possible. Mais bien sûr, c’est un concept qui n’a rien de consensuel. À vous de vous y essayer!

En tout cas, non seulement c’est un coup de cœur, mais je n’ai pas fini de vous parler des femmes de Jim Fergus, car dans leurs murmures, elles m’ont invité à les rejoindre dans leur monde, et je ne saurai résister à un tel bonheur!

Comptine pour la dissolution du monde, Brian Evenson

🔥Chronique🔥

« Il mit un certain temps à trouver ses marques. Au début, il était confus et en proie à la panique. »

C’est sans doute cela, l’effet Evenson. Tout nous échappe et pourtant, le talent est là. On ne peut rien enlever, ni rajouter, c’est juste excellent. L’effet de ces 22 nouvelles est hautement addictif. Les sens, le corps, l’esprit, tout y est sollicité, mais tout y fait pour que nous n’ayons aucune prise, le mystère nous tient. La confusion réside, mais plus encore, la panique. Car si la réalité nous fait voir, entendre, sentir, toucher, goûter autre chose, alors est-ce que nous devons adapter notre intelligence ou aller nous cacher sous la couette en attendant que le mal passe?

Je ne me suis pas cachée, vous imaginez bien, que les frontières troubles, je veux aller voir de près. De très près. De trop près?Je ne crains pas les précipices, ni les vertiges. Alors aller fouiller du côté de nos perceptions et voir ce que l’autre coté a à nous offrir, ça a été un plaisir exquis. Même si des fois, ça n’était pas reluisant. Alors du coup, c’est quoi cette fameuse comptine pour la dissolution du monde? Et qui, que, quoi se dissolve? On parle de quel monde? Et la comptine, elle vient de quelle partie de l’enfance?

Brian Evenson explore des possibles. Des possibles futurs. Des possibles fractures. Des possibles dysfonctionnements. Et cela dans tous les domaines, celui de la santé mentale, celui des cellules familiales, celui de la science-fiction. Rien qu’avec cette matière, les possibles sont infinis. Mais déjà ces 22 entrées sont époustouflantes. Quelle imagination! Mais surtout que de force narrative en si peu de pages. J’ai souvent du mal à m’imprégner avec les recueils de nouvelles, mais ici, tout est parfaitement maîtrisé que j’étais tout simplement fascinée. Impatiente de lire la suivante. Accro au style, à l’étrange, à l’humain. Et au détail qui bascule. Celui qui fait la jonction entre les alternatives. Celui qui fait écho, frisson, horreur. Le détail qui tue. Ce petit truc en plus, qui fait toute la différence. Et qui me pousse à vous emmener vers ces histoires confuses mais captivantes, angoissantes mais passionnantes. Il y a toujours quelque chose à apprendre de ces réalités au contenu sensible. Et ne tenez pas compte des avertisseurs de l’auteur, ces fictions c’est juste des lignes de regard, le choc ne sera pas là, où vous l’attendiez, et si vous sentez un lien d’affinité, peut-être qu’il est l’heure de vous reprogrammer…Alors, prêts?

Moi je vous conseille d’y aller. Une fois, 22 fois, mille et une fois. Je veux bien y laisser ma chemise ou ma peau, risquer tout mon enthousiasme, que vous aller kiffer ce moment! J’ai lu et plus qu’adoré Comptine pour la dissolution du monde de Brian Evenson.

Remerciements:

Je tiens à remercier très chaleureusement les éditions Rivages de leur confiance et l’envoi de ce livre.

Les Forêts de Waldenstein, Stéphane Heaume

🌲Chronique🌲

« Une longue marche m’attendait. Waldenstein se mérite. »

Venez, je vous emmène. Enfin, il serait plus exact de dire que Wald va nous emmener dans un lieu mystérieux: Les forêts de Waldenstein. Mais comme je viens de faire cette balade avec lui, je voulais vous convaincre d’aller faire aussi le déplacement. Waldenstein est presque magique, tant par son atmosphère entre ciel et mer, que par sa terre chargée de souvenirs puissants. Toutes les nuances de bleus agissent comme des catalyseurs de peines et d’amours. Tout ici, a des allures de conte. Il y a des belles à sauver, des guerriers chevaleresques, une guerre plus ou moins déclarée, un domaine à garder…Il y a des ombres et des lumières qui se répondent et font les destins des héros malgré eux…Bien sûr qu’on pourrait y jeter la formule magique « Il était une fois… », mais le lieu est en sommeil. Mais Wald retourne là-bas, et même si tout lui échappe, les souvenirs comme les êtres, il est bien déterminé à découvrir le secret qui pèse sur Les forêts de Waldenstein.

Alors est-ce que cette balade vous tente? J’ai marché sur les sentiers, senti la terre et l’eau, goûter le froid, toucher le marbre, vu des bleus immenses. Et parce que tous mes sens se sont affolés, je reste persuadée que les charmes de ces lieues, sont actifs, moins en sommeil, qu’il n’y parait. Il est inscrit dans ce milieu tellurique, des drames qui n’ont pas fini de parler…Imaginez donc, pour moi, le plaisir immense pour la fana d’ambiance gothique, comme Waldenstein m’a aspiré dans ses eaux troubles…Car si tout est nimbé de beautés sylvestres et autres sortilèges visuels méditatifs, il n’en reste pas moins que des lamentos se jouent entre les arbres. Mais quelle est donc cette douleur, qui semble s’être prise dans le piège du majestueux hôtel familial Wald Ambassador? Est-ce que les sculptures n’ont pas plus à dire, finalement, que les gardiens de ce palace? Vous en dévoilez plus, serait malheureux, mais gardez l’œil ouvert, l’amour n’en a pas fini de vous éblouir, même ici, où la barbarie confirme son règne…

« Je suis là, tu le sais, pour comprendre ce qui s’est passé autrefois, la nuit du drame. Et pour aimer. Aimer une dernière fois. »

Et j’ai aimé. J’ai aimé tout à la fois. J’ai aimé le magnétisme et de ne pas plus saisir que Wald, les choses, les secrets, les différentes lumières. J’ai aimé la Lune qui se jouait de nous. J’ai aimé le rétro, le magique, le jadis. J’ai aimé tout à la fois, parce que cette histoire est un autre-part, une autre part de nous enfouie qu’il faut aller chercher, un quelque part qu’il faut surmonter pour (s’)aimer, encore et encore. Toutes ses parts de lui entre ombres et lumières, il lui faudra les comprendre, mais nous, nous, on se doit de les aimer ses adagios. Et j’ai aimé Les forêts de Waldenstein.

Je rêve sans dormir

Et je dors en marchant

Remerciements:

Je tiens à remercier les éditions Rivages de leur confiance et l’envoi de ce livre.

Bleuets, Maggie Nelson

💙Chronique🩵

2. Je suis donc tombée amoureuse d’une couleur

la couleur bleue, en l’occurrence – comme on tombe dans les rets d’un sortilège, et je me suis battue pour rester sous son influence et m’en libérer, alternativement.

3. Qu’en est-il ressorti? Une illusion choisie, pourrait-on dire…

C’est très sérieux l’amour. Et c’est très sérieux aussi nos illusions. Tellement sérieux, qu’il faut en parler, l’expérimenter, lui donner corps, en faire de la poésie, en tomber d’amour, à s’en relever si l’on a le savoir. Et comme il est question d’amour et d’illusions, la littérature vient à la rescousse de cette narratrice tourmentée. Perdue dans toutes les nuances de bleu(s), elle s’essaie aux Pensées. Des pensées plus ou moins douces, plus ou moins tristes mais toutes d’une beauté extraordinaire. Et du coup, entre ciel et mer, tous les bleus ne se valent pas, et ce tour d’horizon, nous en apprend autant sur la nature humaine, que sur les symboliques qui varient autour de cette couleur si aimée, mais si insaisissable. Le bleu est sujet à méditation. C’est dans le bleu que l’on se perd et que l’on se retrouve. Tout le long de ces 240 entrées dans le bleu m’ont fascinée. Non seulement parce qu’il procure des sentiments différents mais des pistes de réflexions multiples et infinies. Que je m’y arrête aujourd’hui ou demain, dans dix ans, elles me mèneront forcément quelque part dans ma compréhension personnelle du monde. La 83 et la 130 m’ont attrapé hier, mais peut-être qu’un jour je serai emmenée à expérimenter la 99, mais aujourd’hui ou le ciel est gris et menaçant, et que je touche mon pendentif de lapis-lazuli, est-ce que la question de la 151 ne va pas me submerger? Alors est-ce que tout était plaisant? Forcément non. Puisque sont abordés les thèmes de la dépression, du deuil, de la rupture, de la dépendance, de la maladie autant de nuances de bleus qui font référence à des douleurs excessivement fortes. Mais c’est aussi la couleur de l’amour, et c’est toute les nuances d’un cœur-fleur-bleue qui s’ouvre comme par merveille, et vient tutoyer les étoiles. Et parce qu’il est hybride, poétique, philosophique je sais que je vais relire Bleuets. Je vais le relire à la lumière des nombreuses références littéraires que Maggie Nelson nous donne dans ces entrées. Elles les appellent d’une telle façon, qu’on veut aussi, se faire ensorceler, par tous ces bleus invoqués. C’est de la matière que je suis prête à manier, des sorts que je suis prête à faire même, à pleine main et de tout cœur, parce que il me semble que moi aussi, je suis amoureuse du bleu. Est-ce qu’on est bien sérieux quand on est amoureuse d’une couleur? Je le crois, après cette lecture. D’un, parce que les cieux me regardent. Et de deux, parce que je ne veux pas perdre l’illusion, que je vais rejoindre, me fondre, embrasser à bras ouvert, l’infini. L’infini bleu profond, parsemé d’étoiles lumineuses. Aussi rayonnantes que les Bleuets de Maggie Nelson. Suis-je bluette, alors, d’espérer vous convaincre de faire irradier ce bouquet de Bleuets? Suis-je bluette, ou sous le charme?

Loin du noir océan, Astrid Monet

🌊Chronique🌊

-Choses tristes et vagabondes-

Dis-moi, ton cœur parfois s’envole-t-il, Sulyvane?

Loin du noir océan de la belle Barcelone

Vers un autre océan où la colère éclate!

Crue, forte, profonde, ainsi que le pardon?

Dis-moi, ton cœur parfois s’envole-il, Sulyvane?

La mère, la battante mère, crie à la justice!

Le démon des années 80 ronge la jeunesse

Et comme l’Act Up grogne sur les bancs

Il n’est plus de berceuses pour les morts

La mère, la battante mère, crie à la justice!

Emporte-moi SIDA, enlève-moi plutôt que lui!

Loin! Loin! Ici les souvenirs sont faits de pleurs

Est-il vrai que parfois ton triste cœur Sulyvane

Dise: loin de vous, du sang contaminé, des mensonges?

Emporte-moi SIDA, enlève-moi plutôt que lui?

Comme vous êtes beaux, ainsi, frères unis

Où dans vos étreintes coulent l’amour

Où dans vos regards brillent la fierté

Où dans vos cœurs sonnent la musique

Comme vous êtes beaux, ainsi, frères unis!

Mais le paradis de vos souvenirs communs

Les transfusions, le skate, le foot, les rires

Le deuil vibrant derrière les poumons

Avec les poches de sang, le rouge, non chauffé

Mais le paradis de vos souvenirs perdus

Qui est coupable, responsable de tuer des innocents?

Sont-il si menteurs et lâches devant ce tabou

Peut-on rappeler ce scandale sanitaire

Et en faire une prouesse, un si doux roman

Qui est coupable, responsable de tuer des innocents?

Remerciements:

Je tiens à remercier très chaleureusement Astrid Monet ainsi que les éditions Fayard de leur confiance et l’envoi de ce livre.

La mort d’Euripide, Aleksandar Gatalica

🪻Chronique🪻

« mais pousse la porte verte de ta main pâle, cher Euripide, et entrons à l’intérieur, car il ne s’agit pas d’une simple promenade. »

Je n’aurai pas l’audace de m’adresser à Euripide, car il faut connaître l’homme, son art, ses convictions, mais grâce à ce texte, il me parait moins obscur. Je suis loin de maîtriser les multiples références qu’Aleksandar Gatalica s’empare dans cette histoire de haute voltige, mais je me suis accrochée à la musicalité, à la dynamique, et au désarroi du narrateur. Et l’empathie m’est venue pour lui, elle, et tous les autres qui semblent connaître des fluctuances d’humeur et d’état…Je crois qu’il y a dans l’art, un refuge, et j’y étais bien dans celui-ci, parce que l’accueil est non seulement sympathique et franc, mais avec des flashs de couleurs, de textures et d’imaginations qui te laisse, un noeud noué à l’intérieur de ton cœur…Mais je peux toujours chercher les vingt-quatre façons de le faire encore et encore, en allant approfondir la transmission helléniste et autres tragédies grecques, ça n’empêche que je le ferai juste, pour le plaisir. Et c’est ce que m’a laissé ce livre comme impression, ce bonheur futur de rencontrer Euripide et les autres, et dieu sait qu’à l’intérieur de moi, il y aura de la place pour cette harmonie…Mais revenons à La mort d’Euripide…Si le narrateur semble dériver sur les eaux troubles de Venise, la mort, elle, vadrouille comme une vagabonde, libre et débridée. Elle nous échappe autant qu’elle nous fascine, à venir comme ça, nous faire signe. Et la mort d’Euripide, ne fait que renforcer son aura, mais tout son mystère aussi. Donc c’est vrai qu’il est question de mort et de vie. Qu’est-ce que la vie? Et qu’est-ce qu’on fait de la mort, si elle vient nous frapper, les frapper, déstabiliser les convictions? Le deuil dans sa tragédie occupe tout l’esprit des vivants, mais que fait-on de lui, quand on cherche des réponses? Qui est capable de nous hanter aussi bien qu’une mère ou un frère? Si on reçoit le prix de la tragédie est-ce qu’on devient si célèbre qu’on ne meurt plus? Cette échappée à Venise est un voyage philosophique, poétique et artistique. On est pris dans un mouvement de vie et de questionnements qui renverse nos perceptions. C’est à la fois déstabilisant et incroyablement stimulant. Bref, j’ai adoré!

Remerciements:

Je tiens à remercier Zivko Vlahovic ainsi que PlanB éditions de leur confiance et l’envoi de ce livre.

Célestine, Sophie Wouters

💫Chronique💫

Il est des filles belles, très belles, trop belles. Des filles belles comme le jour. Des filles qu’on dirait tombées du ciel. Une de ces filles s’appellera Célestine. Et elle tombera dans un petit village des années soixante, en France. Tombée dans un lieu, une famille, où on n’a que faire de la beauté. Ça ne nourrit pas la beauté, seule la terre le fait. Et puis, la beauté c’est plutôt une malediction dans le coin…

Il est des drames indicibles, terribles, sidérants. Des drames que même le jour ne supporte pas. Des drames qu’on dirait impossibles. Un de ces drames s’appellera pulsion, mais il a d’autres noms aussi, moins beaux, beaucoup moins beaux. Mais la beauté ne dit rien. Et tombé dans ce coin reculé où même dieu n’a pas de valeur, le drame creusera son malheur dans les âmes tendres. Mais le silence reste le maître de ces lieux…

Il est des histoires courtes qui vous percutent de plein fouet. Il n’est pas de mots pour décrire le malheur qui s’obstine, alors Célestine se tait. Elle se tait, parce que personne ne saisit l’état de sidération. Elle se tait, même si son rêve de départ c’était d’être speakerine. Vaste paradoxe du destin, alors c’est ça la poétique de la fille tombée du ciel?!? C’est tout ce que la terre à offrir?!? Je vomis cette facilité qu’ils ont tous à détruire la beauté. Je les vomis, tous autant qu’ils sont, avec leurs pourritures qu’ils ont en eux. Je les vomis dans leurs pulsions, dans leurs jalousies, dans leurs violences…

Et parce que j’aime trop les coquelicots, j’aurai toujours une pensée tendre, pour Célestine. Pour le printemps qu’on lui a volé: une colère aussi rouge que cette fleur. J’ai lu et adoré ce roman, parce qu’il n’y a rien à dire de plus que :Lisez-le! C’est une révélation Pocket, et vous savez maintenant que c’est un gage de qualité, et j’ai toute confiance en leurs choix, car à chaque fois, ils se vérifient et, sont mes coups de cœur ❤️

Remerciements:

Je tiens à remercier les éditions Pocket de leur confiance et l’envoi de ce livre.

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En Féérie, il brille quelques poussières…

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