L’enfant rivière, Isabelle Amonou

🪶Chronique🪶

« Il y avait une différence entre savoir et vivre. »

Savoir et vivre la maternité. Savoir et vivre la xénophobie. Savoir et vivre l’errance. Il y a effectivement une différence monumentale entre savoir ces états, et les vivre. Parce qu’être mère, être nowhere, être perdue dans un monde insensé, c’est ne rien savoir et tout vivre comme un déchaînement de remous incessants. Vivre au cœur de la violence, c’est savoir qu’elle est infinie, tenace, retorse, tempête. Vivre avec la violence, c’est savoir donner la vie à des stratagèmes de survie. Vivre c’est savoir que la violence est partout. Partout, dans la nature, dans l’environnement, dans la société, dans l’Histoire et les futurs anticipés, dans les mémoires et les imaginaires, dans le sang et les écrits. Les marques sont visibles et invisibles, mais toujours dévastatrices…Et il y a savoir et vivre, avec. Même si vivre, ce n’est pas tout à fait exact, c’est survivre qu’il conviendrait de dire. Mais dire, c’est d’abord oser dire, oser parler, oser dénoncer, oser combattre, oser défendre, oser s’insurger pour que chacun soit en droit de savoir. Mais souvent, le traumatisme est si grand, que ne serait-ce que, dire, est déjà, une tourmente…

« Parfois, la rivière ne rendait pas les corps. »

Zoé, Tom et Nathan, c’était une cellule familiale, une promesse, un chemin ordinaire et normé tout tracé…Mais Nathan est devenu L’enfant Rivière. Ne reste que le désarroi des parents, la résignation contre l’espoir féroce, l’instinct contre le chagrin, l’acharnement contre la fuite…Deux manières de vivre le drame, mais la même souffrance partagée, et toujours pas de mot pour désigner cet état…Petit à petit, l’histoire nous dévoile la disparition de l’enfant et les circonstances qui l’entoure. Et entre passé et futur, il y a des similitudes effroyables, des circonstances aggravantes, des fantômes désenchantés qui guettent et se répondent dans l’ombre…Les terres québécoises sont hantées de souffrances et de traumatismes, tous plus violents les uns que les autres, et laissent ces enfants à la dérive et en proie aux plus dévorants…Mais Zoé ne se résigne pas. C’est une femme forte et déterminée, elle prend tout ce qu’elle a dans le ventre, et cherche…

« Certains peuvent beaucoup et d’autres non. »

Elle cherche l’enfant, l’origine, le chemin. Elle cherche la raison, les réponses, l’invisible. Elle cherche la transmission, l’héritage, l’apaisement…Et peut-être ce que nous découvrons, nous lecteurs, c’est un portrait de femme atypique et captivant. Une femme puissante et fragile, qui tente de s’épanouir entre deux cultures, entre deux (dé)rives, entre deux mondes…

C’est une histoire qui m’a beaucoup touchée. Une histoire qui parle du peuple autochtone et des peuples migratoires, qui est entre l’hier et le demain, entre roman noir et quête initiatique. Immersif et renversant!

1 commentaire (+ vous participez ?)

  1. Rétrolien: L'enfant rivière, Isabelle Amonou, Avis de lecture - Aude Bouquine

Laissez un peu de poussière de féerie, cela fait toujours plaisir...

En Féérie, il brille quelques poussières…

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