Feminicid, Christophe Siébert

Une chronique de Mertvecgorod

🩸Ce que j’ai ressenti:

« Comment en est-on arrivé là? »

Comment en est-on arrivé là, à cette indifférence du monde, devant tant de meurtres de femmes? Comment en est-on arrivé à cette vague de Feminicid? Comment expliquer un tel phénomène?

Un homme, Timur Maximovitch Domachev décide de mener une grande investigation, en vue certainement, d’un futur roman pour comprendre les tenants et les aboutissants de cette série de meurtres atroces à l’encontre des femmes. Parce qu’à un moment, (on l’espère) certains devront répondre de leurs actes, devront rendre des comptes, pour qu’il y est réparation(s). En tout cas, c’est cette noble cause que ce journaliste défendra jusqu’à son dernier souffle. Reste donc, entre nos mains en plus de la question étrange de son « suicide », les pages de son manuscrit incomplet mais déjà fortement subversif, fait de multiples documents, annexes, témoignages, bilans chiffrés qui retrace la complexité d’un phénomène de tueries sans précédents…

Déjà, il faut comprendre que ces horreurs sont commises dans une ville rongée par le Mal. En parcourant Mertvecgorod, on est saisi par tout un engrenage de jeux politiques, de fièvre bestiale, de pauvreté chronique, d’hommes imbus de pouvoirs, de mélange de légendes urbaines et d’actes atroces commis en toute impunité, de corruptions et de misères. C’est aussi tout un réseau d’économies souterraines, de trafics en tout genre, de violences et d’horreurs. Mertvecgorod, c’est une ville pourrie de l’intérieur qui se nourrit, avec férocité, de folklore et d’obscurantisme, de sang et de chair fraîche. Autant vous dire que se promener dans ses rues, c’est se confronter à ce qu’il y a de pire en l’Homme…Et à chaque fois, presque inévitablement, c’est les femmes qui en pâtissent…

Malgré la noirceur et la décadence qui se dégage de ces pages, j’ai aimé l’audace et l’originalité de cette lecture. En effet, c’est une enquête journalistique truffée de textes de différentes natures, mais qui relève d’une véritable envie de justice pour ces femmes. Et puis, l’auteur laisse au lecteur, le choix de faire ses propres conclusions sur la portée de ce manuscrit inachevé. Je regrette de n’avoir pas lu le premier tome, Images de la fin du monde, pour saisir encore mieux de l’ambiance de cette ville soviétique imaginaire et corrompue, mais déjà cette chronique, particulière, accès sur les ravages du Feminicid à Mertvecgorod est fort intéressante. Parce qu’il joue entre passé et anticipation, l’auteur nous entraîne dans une dynamique de réflexions sur les dérives du pouvoir de l’État, sur les dangers du capitalisme, sur les théories du complotisme, sur les courants dévastateurs de la violence, tout en agrémentant des profondeurs de la terre, toutes les croyances surnaturelles qui font revenir la bête en chaque homme…

Et comme on le sait, la réalité dépasse toujours la fiction, j’ai été touchée de voir que ce livre est dédié aux victimes du féminicide de Ciudad Juarez. Comme un hommage et une dénonciation de ce phénomène de société inadmissible, l’auteur sensibilise, avec panache et une imagination débordante, sur un sujet d’actualité brûlant…

Et pour contrer cela, on espère que ce fameux virus imaginé de Christophe Siébert, ce « virus » de la bonté, de l’empathie, de la piété contamine le monde entier. Que la « blagocestie » soit contagieuse et partagée par le plus grand nombre!

« En vérité je vous le dis, contaminez-vous les uns les autres. »

Remerciements:

Je tiens à remercier Babelio ainsi que les éditions Au diable Vauvert pour leur confiance et l’envoi de ce livre.

4 Commentaires (+ vous participez ?)

  1. christophesiebert
    Déc 13, 2021 @ 18:12:58

    Merci pour cette belle critique de mon bouquin 🙂

    Réponse

  2. Elhyandra
    Nov 14, 2021 @ 15:24:27

    Je veux le lire car je suis sûre que c’est d’utilité publique mais quand on voit les commentaires des mecs sous ce genre de publication ça ne me donne pas grand espoir pour l’avenir

    Réponse

Laissez un peu de poussière de féerie, cela fait toujours plaisir...

En Féérie, il brille quelques poussières…

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